Comment la Suisse résiste-t-elle à la surévaluation réelle de sa monnaie ?

Cette question est intéressante bien au-delà du cas de la Suisse : est-il possible qu’un pays conserve une économie prospère malgré une très forte surévaluation de sa devise vis-à-vis de celle de son partenaire économique essentiel ?

A priori, ceci n’est possible que si :

  • les secteurs exposés (industrie, services échangeables…) produisent des biens extrêmement différenciés (par leur nature, leur qualité, leur sophistication…), dont la demande est très peu sensible à leurs prix ;
  • ces secteurs ne pouvant pas alors être de grande taille, s’ils sont très sophistiqués, le plein emploi est assuré par l’existence d’un secteur produisant des biens et services non échangeables, de taille importante, et de niveau de productivité assez faible. Ceci implique une subvention du secteur non exportateur par le secteur exportateur qui paye les prix
    élevés du secteur non exportateur.

Compte et banque en Suisse

Quand on examine la situation de la Suisse, on voit à l’œuvre ce modèle, avec un rôle très important des services exportables sophistiqués (services aux entreprises, services financiers, d’assurance…) et avec un développement de l’industrie manufacturière rapide malgré la surévaluation du change.

L’économie suisse a une performance bien supérieure à celle de la zone euro malgré la surévaluation excessive du franc suisse. Comment cela est-il possible ?

Pour résister à la surévaluation réelle du change, un pays doit normalement avoir :

  • un secteur exportateur (industrie, services exportables…) produisant des biens différenciés, de forte qualité de manière à ce que la surévaluation du change ne freine pas les exportations et la production industrielle ;
  • un secteur non exportateur (construction, services aux ménages…) de grande taille,  capable d’assurer le pleine emploi (le secteur exportateur est normalement d’assez petite taille s’il ne produit que des biens et services sophistiqués).

Voit-on ce modèle en Suisse ?

L’élasticité-prix des exportations en volume de la Suisse est de – 0,30, ce qui montre le niveau de gamme assez élevé de la production suisse, ce qui explique la bonne résistance des exportations de la Suisse à l’appréciation réelle (graphique 6) , même si la Suisse perd des parts de marché dans le commerce mondial.

Quand on regarde la balance commerciale de la Suisse par produits, on voit que la force de l’économie suisse vient en particulier du niveau extrêmement élevé de l’excédent des services. La taille des secteurs exportateurs confirme le rôle important des services exportateurs (services aux entreprises, services financiers et d’assurance) ; mais on voit aussi que si le poids de l’emploi manufacturier recule, la capacité de production de l’industrie continue à progresser fortement, malgré la surévaluation du change, grâce à la différenciation de produits.

On comprend mieux la résistance de la Suisse à la surévaluation réelle du change

Malgré la surévaluation réelle du change, l’économie suisse est en très bonne santé. Nous l’expliquons par le modèle économique particulier de la Suisse :

  1. le niveau de gamme élevé, la différenciation de la production, dans le secteur exportateur (industrie, services exportables), avec le rôle très important des services exportables
    et la progression forte de la capacité de production manufacturière ;
  2. le développement des secteurs domestiques, non exportateurs, qui assure le plein emploi.
    Il faut voir que ceci implique une très forte efficacité du secteur exportateur,
    qui doit subventionner le secteur non exportateur (payer le prix élevé des services) pour  que ce dernier soit de grande taille.

Source d’information Natixis

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